Mines et Carrières de Mohammedia: Entre les enjeux socio-économiques et environnementaux
Yassine CHAOUI1. Moustapha OUADRIM1
1 Laboratoire Dynamiques des Espaces et des Sociétés, Facumté des lettres et des Sciences Humaines de Mohammedia, Université Hassan ll de Casablanca
Email: ysne.chaoui@gmail.com
DOI: https://doi.org/10.53796/hnsj63/7
Arabic Scientific Research Identifier: https://arsri.org/10000/63/7
Pages: 143 - 160
Received at: 2025-02-07 | Accepted at: 2025-02-15 | Published at: 2025-03-01
Abstract: L'exploitation des mines et carrières au Maroc, notamment à Mohammedia, génère d'importants revenus grâce à des ressources telles que le sel gemme, l'argile, le gypse et le fer. Cependant, les carrières d'argile ont des impacts négatifs sur l'environnement et la population, comme la poussière, le bruit et la dégradation du paysage. Bien que la loi 12-03 impose des études d'impact, beaucoup ne la respectent pas en raison de l'ancienneté et de l'inapplicabilité de cette loi. Le secteur est donc souvent informel et anarchique, avec des exploitations sans études d'impact ni plans de réaménagement. Le ministère de l'Équipement et du Transport prépare une nouvelle loi pour clarifier les responsabilités des acteurs. Les entrepreneurs doivent réaménager les sites après exploitation, mais manquent souvent de volonté pour le faire. Une exploitation améliorée et une sensibilisation accrue sont nécessaires pour que tous les intervenants bénéficient de ces activités.
.
Au Maroc et partout dans le monde, l’activité extractive génère des profits très important pour l’état en matière de développement. C’est pour cela, ce domaine participe substantiellement dans la vie économique de notre Royaume.
En matière de chiffre, ce domaine assure plus que 6% du PIB marocain, couvre 21% des recettes d’exportations et assurant aussi l’embauche de milliers de personnes sans oublier que le chiffre d’affaire réalisé annuellement est estimé de 32 milliards de dirhams. Ce secteur très vif est à l’origine d’une grande part des revenues de transport (ferroviaire et portier) ainsi qu’une grande consommation d’énergie.
Les mines et carrières touchent le « développement » dans son coté humain, par la création de plusieurs heures de travail et aussi par la construction des infrastructures que notre pays en manque beaucoup (routes, hôpitaux…). Au Maroc plusieurs villages ont été abandonnés après la fermeture de leurs sites extractifs, vu que ces derniers présentaient l’activité exclusive des habitants.
Certes les mines et carrières ont un apport très bénéfique en matière d’économie mais la non-réhabilitation (due essentiellement à l’absence d’une vraie loi) présente un impact négatif essentiellement sur l’environnement.
Donc, les problèmes environnementaux qui en résultent de l’extraction sont très importants en voiture de l’absence d’une vraie législation qui précise les droits et les responsabilités de chaque intervenant. Par ailleurs, la prise en conscience par les investisseurs de la nécessité d’une réhabilitation une fois l’exploitation est finie est très importante voire nécessaire.
D’autre part, le port de Casablanca un des plus grands chantiers dans l’histoire du Maroc fête cette année son centenaire. Il a nécessité lors de sa construction (en 1913) de très grande quantité de matériaux de construction ainsi que la construction d’une grande métropole a conduit à l’ouverture de plusieurs carrières dans les environs de Casablanca dont celle de Mohammedia.
L’objectif principal de ce présent travail est de présenter l’apport d’un géologue pour sa société en étudiant les mines et carrières de la ville de Mohammedia. Les objectifs tracés pour notre travail de stage se présentent comme suit :
- Tracer l’historique à propos des carrières;
- Examiner les expériences internationales et nationales dans le domaine de la réhabilitation des sites extractifs ;
- Présenter l’aspect juridique du secteur en présentant les perspectives ;
- Inventorier les sites extractifs de Mohammedia ;
- Etudier le cas des mines et carrières de « Chaaba Hamra » situé dans la vallée de l’Oued Nfifikh;
II.1. Impact environnemental d’une carrière
L’ouverture d’une nouvelle carrière est conditionnée par la réalisation d’une étude d’impact. Une étude d’impact est une étude technique qui vise à apprécier les conséquences de toutes natures d’un projet, notamment environnementales pour tenter d’en limiter, atténuer ou compenser les impacts négatifs.
Au Maroc, la loi 12-03 stipule la création d’un comité national et des comités régionaux des études d’impact sur l’environnent présidés par l’autorité chargée de l’environnement. Ces comités qui ont le rôle de se prononcer, sur la base des résultats de l’étude d’impact, quant à l’acceptabilité environnementale qui conditionne la mise en œuvre des projets assujettis. Les activités liées à l’industrie extractive sont assujetties à l’étude d’impact sur l’environnement.
D’ailleurs, l’industrie extractive génère des profits très important mais présente aussi des impacts négatifs sur l’environnement, Il en existe plusieurs (El Gharib, 2006) dont :
La pollution de l’air est responsable de la mort de millions de personnes au monde, c’est bien la pollution atmosphérique qui provoque ces nouveaux cancers. Les causes sont nombreuses dont les usines, les véhicules, les décharges publique…. Et aussi les carrières !!
Les carrières présentent un impact négatif sur l’air par l’action de la poussière et les émissions de gaz.
La réduction de la qualité de l’air est induite, entre autres, par les poussières emportées et dépôt de poussières suite à l’extraction et aux activités de criblage et de traitement, du chargement et au transport des produits miniers.
Les poussières sont généralement de nature minérale et peuvent, dans certains cas, constituer un facteur aggravant des problèmes respiratoires. Les poussières émises par les cheminées des usines (< 10 μg) ne représentent qu’une partie des poussières liées à notre activité, mais sont les plus facilement mesurables.
Les poussières diffuses proviennent, quant à elles, des carrières, du transport ou du stockage des produits. Elles affectent plus directement les riverains et contribuent significativement à l’augmentation de la concentration dans l’air.
Ces poussières, plus difficiles à mesurer sont maîtrisées de différentes manières : arrosage des pistes d’accès, stockage des matériaux avec de l’eau ou dans des bâtiments clos, etc.
Le transport par la route génère différentes émissions : CO2 mais aussi NO2 et particules, qui peuvent représenter des nuisances pour le voisinage. A cela s’ajoutent d’autres nuisances éventuelles liées à l’engorgement, au bruit et à la sécurité routière.
L’extraction implique aussi la réduction de la qualité de l’eau avec surtout l’augmentation des matières en suspension ou infections de solutions polluées dans la nappe phréatique.
Les districts miniers abandonnés laissant en surface des déchets miniers et rejets de laverie qui constituent une véritable source de pollution du sol et des ressources en eau de la région (Oued Mouloya) (Outtaleb, 2010).
II.2.3. Impact sur la biodiversité
L’extraction peut menacer la biodiversité par la destruction des habitats écologiques provoquée par l’élimination du couvert végétal et par les changements de régime des eaux de surface et souterraines locales.
Cet impact est manifesté par une perturbation et modification du paysage visuel causées par le mauvais tracé et la mauvaise conception des mines à ciel ouvert, par le stockage non contrôlé de la couche de terre arable et des déchets rocheux et par la localisation des usines fixes ou mobiles de traitement et des bâtiments annexes.
-le bruit des installations, des tirs de mines et des engins de transport fait fuir les animaux sauvages.
-l’ingestion de poussières, toxiques pour certaines notamment pour les ruminants (fluorine, arséniate,…) est l’un des impacts négatifs sur la faune.
– les coupures créées par les fronts de taille empêchent le cheminement habituel des animaux.
– les poissons et les mollusques d’eau douce sont victimes des pollutions chimiques ou mécaniques, du manque d’oxygène et de l’existence d’une turbidité élevée.
– les feuilles sont recouvertes de toute sorte de poussières : photosynthèse, évapotranspiration, se font d’une manière très réduite.
– un nouveau microclimat peut redistribuer le rayonnement solaire, impliquant une modification du sens de circulation des masses d’air, des zones d’ombre donc des variations journalières et saisonnières des températures.
– les solides en suspension empêchent la réalisation de la photosynthèse et la croissance des algues et des plantes d’eau. En effet, les rayons solaires ne peuvent pas pénétrer.
– La pollution des eaux souterraines.
-L’érosion du sol.
– La destruction et dégradation des terres agricoles.
III. Etude d’impact sur l’environnement
L’Etude d’Impact sur l’Environnement (EIE) constitue un outil de prévention dans le cadre d’une politique de protection de l’environnement qui comprend généralement trois volets :
- la surveillance et le suivi de l’état de l’environnement ;
- la réparation des dégâts déjà causés par l’homme (volet curatif) ;
- la prévention de futurs dégâts (volet préventif) ;
L’EIE a pour objectif principal de prévenir et de limiter les nouvelles dégradations de l’environnement liées aux activités humaines. Le Maroc s’est engagé au niveau international à utiliser l’étude d’impact sur l’environnement en adoptant lors de la Conférence de Rio :
Le texte de l’Agenda 21 des Nations Unies qui insiste dans plusieurs chapitres sur l’importance des études d’impact pour prévenir la dégradation de l’environnement; La Déclaration de Rio qui stipule notamment que « lorsqu’ils jouissent d’un pouvoir de décision adéquat, les gouvernements doivent soumettre à une évaluation d’impact environnemental tout projet susceptible de causer des dommages notables à l’environnement».
Par l’adoption de la loi 12-03 relative aux Etudes d’Impact sur l’Environnement (Dahir N° 1.03.60 du 10 Rabii I 1424), l’action de préservation et de promotion de l’environnement au Maroc prend une ampleur jamais égalée. Cette loi rend obligatoire le recours aux études d’impact sur l’environnement pour tous les projets mentionnés dans la liste annexée à ladite loi.
Dans le but de décentralisation et de promotion du rôle de la région, la loi 12-03 stipule l’instauration de Comités Régionaux des Etudes d’Impact sur l’Environnement et l’ouverture de l’enquête publique. Ces comités sont appelés à jouer un rôle majeur dans la dynamique qu’a incité l’entrée en vigueur des décrets d’Application de la loi 12-03. Selon les articles 3 et 13 du décret n° 2-04-563 du 5 kaada 1429 (4 novembre 2008) relatif aux attributions et au fonctionnement du comité national et des comités régionaux des études d’impact sur l’environnement :
Le comité national est chargé de l’examen des études d’impact sur l’environnement des projets:
- Dont le seuil d’investissement est supérieur à deux cent millions de dirhams (200.000.000,00 DH) ;
- Dont la réalisation concerne plus d’une région du Royaume, quel que soit le montant de l’investissement ;
- Transfrontaliers, quel que soit le montant de l’investissement ;
Les comités régionaux sont chargés d’examiner d’examiner les études d’impact sur l’environnement relatives aux projets dont le seuil d’investissement est inférieur ou égal à deux cent millions de dirhams (200.000.000,00 DH).
De plus, avec la publication des décrets d’application de la loi 12-03, (le décret n°2-04-563 relatif aux attributions et au fonctionnement du comité national et des comités régionaux des études d’impact sur l’environnement et le décret n°2-04-564 fixant les modalités d’organisation et de déroulement de l’enquête publique relative aux projets soumis aux études d’impact sur l’environnement, promulgués le 20 novembre 2008), le système EIE au Maroc est entrain de connaître une nouvelle étape qui sera marquée par la déconcentration du processus d’évaluation et la prise en considération de l’avis de la population concernée de manière systématique.
III.5. Perspectives de réforme du secteur des mines et carrières
Ces dernières décennies, la vitesse de réforme a augmenté dans plusieurs domaines dont celui des mines et carrières au Maroc.
Pour mettre de l’ordre dans ce secteur plus ou moins informel plusieurs lois ont été mises en service pour en finir:
III.5.1. Circulaire du 1 er ministre 6/2010 (14 juin 2010)
Cette circulaire Concerne essentiellement l’organisation de l’exploitation ainsi que le contrôle des carrières, elle a essayé de mettre un peu de l’ordre dans ce secteur mais cela n’est pas suffisant.
III.5.2. Loi 21-09 relative aux mines (en phase final)
Ce texte vise à l’élaboration d’une stratégie pour la modernisation du secteur minier hors phosphates (examiné par le Conseil de Gouvernement le 11/11/2010 et le Conseil des Ministres le 1/04/2011).
III.5.3. Nouvelle loi relative aux carrières
En publiant la liste des agréments d’exploitation des carrières, le ministère de l’équipement et de transport a fait polémique pendant l’année dernière (2012). Selon le ministère tutelle, plus de 55% des sites sont non déclarés à l’état ce qui génère des manques à gagner de l’ordre de 5 milliards par an.
D’ailleurs, une nouvelle loi et un nouveau cahier de charge est en train d’élaboration. Mieux encore, des bureaux topographiques seront chargés d’identifier et de contrôler ces carrières, et ce en coordination avec le ministère de l’intérieur.
L’exploitation sera assujettie à une autorisation et à l’obligation d’aménager le site. En effet, le nouveau texte vise à remédier à l’anarchie de l’extraction. Il pallie ainsi « le laxisme » des anciens textes.
IV. Les mines et carrières de Mohammedia {étude de cas} :
IV.1. inventaire des sites extractifs de la région de Mohammedia
Figure 1: Carte de localisation des mines et carrières de Mohammedia
La mine de Ain Tekki est la plus grande mine de sel gemme au Maroc, elle est exploitée par La Société de Sel de Mohammedia « S.S.M. » filiale appartenant à l’état au nom de l’ONHYM (office nationale d’hydrocarbures et mines). Cette mine est en activité depuis mars 1974. Le gisement de sel est encaissé dans les argilites liasique qui s’étendent sur 80 km (de Berrechid à Mohammedia).
La mine de sel est située à 12 km au Sud-est de la ville de Mohammedia et 23 km de la ville de Casablanca. Le village le plus proche est Aïn Tekki situé à 1 km de la bordure de la route nationale n° 1 reliant Casablanca à Rabat.
Photo 1: Halite d’Ain Tekki Photo 2 : Mine de sel d’Ain Tekki
Le Produit (Le sel gemme) : Le sel gemme extrait des mines est employé dans 14 000 utilisations connues depuis l’ère de l’homme de la caverne, sa plus grande utilisation est dans la cuisine comme épice mais il est aussi utilisé pour le déneigement des routes, l’électrolyse et la préparation des aliments de bétail. Le sel aurait été formé après évaporation d’une mer épicontinentale pendant l’époque triasique.
Le gypse est un minerai d’évaporite, permettant essentiellement la fabrication de plâtre. Le gisement de gypse se trouve dans les bordures de l’Oued Maleh. Le gypse est encaissé et intercalé dans les argilites d’âge liasique. Ces évaporites auraient été formées après évaporation d’une mer épicontinentale pendant l’époque liasique. (Yousfi, 2005)
L’extraction du gypse a était abandonnée (ph.3), la seul mine de gypse fonctionnel au Maroc est celle de Safi.
Photo 3 : Galerie de gypse à l’Oued Maleh.
Le fer est un minerai stratégique très utilisé surtout en sidérurgie, il a était exploité dans la région de Chaaba Hamra (ph.4). On y exploitait à « Chaaba Hamra » surtout les minéralisations ferrifères disséminées dans les formations gréso-conglomératiques triasiques.
Photo 4: Galerie pour l’exploitation du fer Dans la région “Chaaba Hamra”
Les carrières de Mohammedia produisent de l’argile triasique et liasique. On distingue 2 principaux sites :
Les carrières sont situées aux bordures de l’Oued Maleh. On y extrait de l’argile liasique (ph.5) pour la fabrication des briques, céramiques et tuiles
Photo 5 : Carrière d’argile de l’Oued Maleh
Les carrières sont situées aux bordures de l’Oued N’fifikh. On y extrait de l’argile triasique pour la fabrication des briques, céramiques et tuiles. Dans cette recherche, on étudiera les carrières d’argiles triasiques de « Chaaba EL Hamra » (ph.6).
Photo 6: Carrière d’argile de « Chaaba Hamra »
VI.2. Etude de cas : mines et carrières de « Chaaba Hamra » (Oued Nfifikh)
VI.2.1. Situation géographique
La région « Chaaba Hamra » est située dans la rive gauche de l’Oued N’fifikh (fig.4), à 42 km de la capitale économique du Royaume, à 16 km de Mohammedia et 10 km du centre de ben Yekhlaf (Had-Luizya)
Le climat de la région est méditerranéen (hivers doux et humides et des étés chauds et secs), la moyenne de précipitation est 400mm.
« Chaaba Hamra » est comme toutes les régions traversées par Oued Nfifikh, possèdent un couvert végétal très dense.
La région Mohammedia- Benslimane constitue un trésor ornithologique avec beaucoup d’espèces d’oiseaux représenté par une espèce rare la sarcelle marbrée, ainsi que par plusieurs autres espèces comme le canard colvert, l’aigrette garzette, la sterne naine, la glaréole à collier, le pluvier à collier interrompu qui se reproduisent sur place ainsi que 80 espèces recensées sur place.
L’activité essentielle des habitants est l’agriculture, la région de Mohammedia compte plusieurs industries dont celle de raffinage de pétrole « Samir » ( c’est la plus grande raffinerie de pétrole au Maroc) Sans oublier l’industrie extractive avec des mines abandonnées comme les mines de gypse et ce des mines en cours d’exploitation comme la mine de sel qui représente la plus grande mine de sel au Maroc.
Dans la région de « Chaaba Hamra » on va s’intéresser à la période triasique car elle est riche en minéralisation.
Le Trias est subdivisé lithologiquement de bas en haut en :
– Buntsandstein : généralement des conglomérats et grés bigarré.
– Mushelkalk : carbonates ou calcaire coquiller ;
– Keuper : marnes et évaporites ;
Les dépôts du Trias marocain apparaissent actuellement dans de nombreux affleurement, qui ne sont en fait que la partie visible de bassin plus vaste reconnu à travers les études géophysique et forages (Yousfi, 2005).
La région d’étude « Chaaba Hamra » appartient à la meseta côtière, c’est la zone la plus occidentale de la meseta, elle est affectée de vastes plis dont les anticlinaux font affleurer des terrains du Cambrien et de l’Ordovicien et les synclinaux des terrains du Silurien et du Dévonien (Pique, 1979)
IV.2.3. Etude litho-stratigraphique
Cette étude a été menée dans la région « Chaaba Hamra » dont on a trouvé de la base vers le sommet les faciès suivants (fig.3 et fig.4):
A la base de la formation se trouve des schistes (ph.7) d’âge cambro-ordovicien (Zahour et al., 2007), de couleur grise dont la schistosité est modelée (la roche est débitée en frite).
Photo 7: Socle psammitique cambro-ordovicien
Au-dessus des schistes, on trouve des conglomérats ferrugineux qu’ils recouvrent en discordance angulaire (ph.8). Ce sont des roches de couleur rouge hématitique, contenant des éléments millimétriques à décimétriques, de forme anguleuse avec quelques éléments émoussés (transport long des éléments). Ce faciès passe à des µconglomérats, silt puis des grés.
Socle
Conglomérat
Photo 8: Discordance angulaire entre le socle cambro-ordovicien et les conglomérats du trias
On remarque qu’il y a alternance dans cet ensemble des conglomérats, µconglomérats, grés et silt (ensemble silito-gréso-conglomératique) d’âge vraisemblablement triasique (Farki et al., 2012) et l’épaisseur de cet ensemble est de 20 mètres.
D’autre part, le conglomérat est affecté par des filons d’hématite (ph.10) de couleur rouge, l’épaisseur est mm à dm avec une extension métrique dont l’orientation est N20 et un pendage vertical. L’hématite en filons, peut être massive (périphérie du filon) ou concrétionné (cœur du filon)
Photo 9: Faciès de conglomérats ferrugineux Photo 10: Filon d’hématite recoupant les conglomérats
On passe ensuite à une épaisse série d’argilites triasique (Zahour et al., 2007) de couleur rouge à brun dont l’épaisseur est supérieure ou égale 40 m. Ce faciès représente l’argile exploitée dans les carrières de Chaaba Hamra.
Le Faciès argileux passe progressivement à des niveaux basaltiques (ph.11) de couleur verdâtre et structure vacuolaire, recoupé par des filons siliceux ou carbonatés verticaux (ph11) à sub-verticaux d’épaisseur décimétrique à centimétrique dont l’orientation est N20.Ces filons sont d’une extension métrique à décamétrique.
Photo 11 : Filons de silice recoupant le basalte triasique
Au sommet de cette formation repose le calcaire Néogène, de couleur blanche à jaunâtre dont on note la présence des conglomérats à la base contenant des éléments (psammites, quartzites…) émoussés enrobés d’un ciment carbonaté.
Photo 12 : Conglomérat Néogène
Faille « Chaaba Hamra »
Argilites inférieures
Ensemble silito-gréso conglomératique
Photo 13 : Faille de « Chaaba Hamra »
Photo 14 : Formation géologique « Sidi Larbi »
de ” Chaaba Hamra”
Figure 3 : Coupe géologique de la région
de ” Chaaba Hamra”
La minéralisation ferrifère de « Chaaba Hamra » existe en plusieurs aspects. L’étude des corps minéralisés permet de mettre en évidence deux types de minéralisation ferrifère :
1 er type : minéralisation disséminée (dia-génétique) dans les grés, conglomérats et argilites. Cette minéralisation est d’âge syn. à post-triasique.
Photo 16: Conglomérat ferrigineux triasique
Photo 15: Conglomérat ferrugineux triasique
2 éme type : minéralisation filonienne hydrothermale (ph.15) dont on distingue des structures concrétionnées (ph.16) et massives (ph.17). Cette minéralisation est d’âge syn. à post triasique, probablement liée à l’orogenèse atlasique (Zahour et al., 2007).
Photo 17: Hématite Concrétionnée ou mamelonnée (cœur du filon)
Photo 18: Filon d’hématite encaissé dans les conglomérats triasiques
Photo 19: Hématite massive (parois des filons)
VI.2.5. Enjeux socio économiques de l’argile :
Dans la région de « Chaaba Hamra », On y exploitait l’argile et le fer. Le gisement du fer a été abandonné vu que le cout d’exploitation était très élevé alors que les carrières d’argiles sont en cours d’exploitation.
L’argile est une roche très utilisé par l’homme (fig.5), il présente une grande diversité de matériaux écologiques. Localement, l’argile extrait des carrières de « Chaaba Hamra » est utilisé essentiellement pour la fabrication des briques rouges et tuiles. L’argile est aussi utilisée par les artisans pour l’industrie de céramique (Tajine, vases…).
Bien connue pour être un matériau de structure traditionnel, la brique Terre Cuite n’en est pas moins créative car elle permet toutes les audaces architecturales.
Pour le toit, les tuiles terre cuite conjuguent une parfaite imperméabilité à l’eau et une esthétique remarquable. Plates ou galbées, la richesse de leurs formes et de leurs coloris permet toutes les audaces.
Les immenses possibilités de travailler la terre cuite, via sa texture, ses couleurs, ses formes, font de ces produits de construction l’allié incontournable des amateurs d’architecture et de bel ouvrage, qu’ils soient attachés à la tradition ou adeptes des dernières innovations et tendances.
De plus, l’argile extrait de la carrière « Chaaba Hamra » est transporté à des fours c’est pour cette raison plusieurs sociétés spécialisées ont été installés prés de la carrière plus précisément dans la commune de Ben Yekhlef (ph.20).
Avant de mettre l’argile au four (cuisson) pour fabriquer les matériaux terre-cuite, il subit plusieurs étapes dont :
a)Le traitement primaire :
On ajoute à l’argile des adjuvants naturels (sable, sciure de bois) et de l’eau. Le mélange de matières premières est broyé jusqu’à l’obtention d’un mélange homogène, on obtient alors une pate. Cette pâte a pour but d’éliminer les impuretés, d’émietter les argiles, de former des mélanges et d’homogénéiser et d’humidifier l’ensemble.
b) Le façonnage :
L’argile est alors façonnée (par extrusion ou moulage) en petits éléments parallélépipédiques. Le façonnage répond à deux objectifs, le premier c’est de donner à la pâte une cohésion suffisante, le second c’est d’attribuer la forme souhaitée.
c) Le séchage :
Le produit ayant maintenant sa forme définitive, il faut éliminer la presque totalité de l’eau (teneur en eau 15 à 30% par rapport à son poids sec) qui a permis le façonnage pour que celle-ci ne perturbe pas la cuisson. C’est l’opération de séchage, une opération de dessiccation extrêmement délicate. Cela demande un savoir-faire particulier car on doit veiller à la bonne humidification et ventilation des produits.
Le séchage peut s’effectuer de manière naturelle à l’air libre ou être accéléré par un dispositif industriel.
d) La cuisson :
Une fois l’eau éliminée, les produits secs sont cuits. L’action de la chaleur provoque des modifications de masse volumique, de dureté, etc.… Ainsi nait la Terre Cuite. A partir de ce moment, le phénomène de transformation de l’argile en Terre Cuite devient irréversible. Cette dernière étape définit et pérennise les propriétés intrinsèques du produit : résistance mécanique, porosité, absorption d’eau, résistance au gel, couleurs et textures, et stabilité définitivement de sa forme.
La cuisson se fait en trois phases :
– le préchauffage (montée progressive en température),
– la cuisson proprement dite (entre 900°C et 1200°C selon les matières premières
et les produits),
– le refroidissement.
La durée du cycle de cuisson de 12h à 48h peut varier selon les argiles utilisées et la température de cuisson. Les fours les plus utilisés sont les fours tunnels, qui permettent une production en continu, alimentés au gaz naturel. Les artisans utilisent des fours intermittents destinés à des petites séries, où le cycle de cuisson peut être adapté aux types de produits. Certains sont dotés de fours continus à feu mobile de type Hoffmann,
Migeon. Les énergies utilisées sont le charbon et le bois, ou encore l’électricité, voire des combinaisons.
VI.2.6. Impact socio-économique des carrières :
Tout ouverture d’une carrière conduit à l’ouverture de plusieurs commerces de consommation (cafés, bureaux de tabac…)
Les carrières d’argile font travailler les habitants avoisinant, leur fermeture (certaine) causeront le chômage et le manque de liquidité des commerçants (la faillite des commerces). Vu le climat semi aride du Maroc caractérisé par la succession de saisons sèches, les ruraux se trouvent encore plus démunis et mal habitués, incapables de faire face à leur nouvelle situation. Ils migrent en ville.
VI.2.7. Impact environnemental des carrières de Chaaba Hamra
Les carrières « Chaaba Hamra » présentent des risques plus ou moins dangereux autant pour l’homme que pour leur environnement, on dénombre plusieurs risques dans ces carrières dont :
L’extraction de l’argile triasique de « Chaaba Hamra » ainsi que son transport entraine de grandes vagues de poussière, cette poussière est très dangereuse pour tout être vivant.
Cette poussière provenant des carrières peut causer des maladies permanentes respiratoires comme la silicose pour les ouvriers des carrières et les habitants avoisinants.
De plus, la présence de cette poussière sur les feuilles influence la photosynthèse et peut même l’empêcher.
L’activité extractive dans la région « Chaaba Hamra » a créé des falaises de plus de 40 mètres d’altitude (ph.21), ces falaises peuvent couter la vie à l’homme ainsi que les animaux d’élevage surtout que l’activité quasi exclusive des habitants est l’élevage et l’agriculture.
Cependant, l’exploitation non raisonnable qui consiste à un profit instantané détruit et modifie le paysage, ainsi la possibilité de réaménager la carrière après sa fermeture en terre agricole est éliminé.
L’eau source de vie pour l’homme, le corps humain ne peut se passer de l’eau plus de 2 jours. Aujourd’hui, l’eau pure devient plus rare et il faut donc le protéger et le sauvegarder contre la pollution.
Par ailleurs, le lac apparu par l’activité extractive de l’argile dans certaines carrières est en contact direct avec plusieurs sources de pollution dont les huiles des engins. Donc la pollution de ce lac menace la nappe phréatique de toute la région de Mohammedia, D’où l’intérêt de protéger ce lac.
Les engins de transport et d’extraction est la source unique du bruit dans la carrière « Chaaba Hamra ».
De plus, le passage de camions ne sera pas sans effet sur la population avoisinante de la carrière à raison d’un passage toutes les 10 minutes.
Ces bruits dérangent la population ainsi que la faune locale. Ces bruits font fuir les animaux sauvages et peuvent même les pousser à migrer vers d’autres places.
a) Avant la fermeture de la carrière
Pour limiter l’action des poussières l’exploitant de la carrière est tenu à :
- Arroser les pistes d’accès.
- Bâcher les véhicules.
- Installer un système de lavage des roues en sortie de site.
- Implanter des arbres dans les bordures de la carrière.
- Protéger le site contre les chutes en raison des falaises.
De plus, le gérant de la carrière doit veiller sur la protection du lac des sources de pollution comme les huiles des engins.
D’autre part, le cout de réaménagement sera très élevé si l’exploitant de la carrière attend jusqu’à la fin d’exploitation, il est préférable de réaménager partiellement le site en même temps que l’exploitation, on recommande que l’exploitation soit par phase :
- Aménagement agricole
Cette méthode consiste à La coordination de l’exploitation au réaménagement est une priorité. Dès la fin de l’exploitation de chaque tranche (1 ou 2 ha), le réaménagement est mis en œuvre. Les avantages de cette technique est de réduire au maximum’ altération de la terre végétale décapée par des stockages temporaires et aussi pour réduire le cout de réaménagement.
- Reboisement
Cette méthode comprend l’implantation d’arbres et plantes. Elle consiste à faire un reboisement après la fin de l’extraction dans une zone.
Le reboisement permet donc d’installer un maximum et une diversité d’arbre et plantes ceci favorisera le développement de la faune.
b) Après la fermeture de la carrière
Nous proposons dans ce qui suit plusieurs solutions et plans de réhabilitation de ces carrières pour valoriser les sites et atténuer les impacts négatifs sur l’environnement et le paysage.
- Création d’une zone humide
Après la fermeture de la carrière Chaaba Hamra on peut créer une zone humide semblable à celle créé au parc nationale d’Ifrane. Ce parc constitue un pôle touristique de prédilection pour les randonneurs et les pêcheurs qui pratiquent ce sport dans une ambiance sereine en espérant que le site Chaaba Hamra le deviendra un jour.
Le site est favorable géographiquement pour créer une zone humide vue que :
- La carrière possède un lac d’eau douce permanent.
- la région de Mohammedia possède une faune très diversifié dont la présence de quelques espèces rares.
- Création d’une zone de chasse
La région Mohammedia possède une faune chassable très riche dont le plus populaire le perdrix et le sanglier. L’aménagement de la carrière de « Chaaba Hamra » ne nécessitera pas de grand coût vue que la région est favorable pour le développement d’une faune chassable (présence de l’eau, végétation et relief).
Or, la région de Mohammedia souffre de la chasse informelle, il est nécessaire de créer une zone de chasse dont la carrière de « Chaaba Hamra » est un endroit très idéal.
- Création d’un hippodrome
Au Maroc, les passionnées par les courses de chevaux sont de l’ordre de millions et ne cessent d’augmenter d’un jour à l’autre. La reconversion de la carrière « Chaaba Hamra » en un hippodrome arbitrant les courses de chevaux et un club d’équestre est un projet certainement gagnant.
- Création d’un club de golf
Un des projets de réaménagement proposé des carrières de « Chaaba Hamra » est celui de créer un club de golf. Selon les spécialistes de tourisme, la combinaison de Voyage et de golf depuis plusieurs années fait rage à travers le monde.
La beauté naturelle et la topographie particulière des paysages du Maroc fournis l’ingrédient idéal pour ce sport car ils créent un défi supplémentaire pour le golfeur en profitant des grandes opportunités permettant de développer son jeu et sa stratégie.
Donc, la création d’un club de golf à 2 pas de la capitale économique du royaume et pas loin de la capitale administrative est un projet idéal pour l’investissement.
- Création d’un club de pêche
Les passionnés de la pêche à ligne à Casablanca doivent se déplacer très loin pour pratiquer leurs sports alors que la création d’un club de pêche dans la carrière de Chaaba Hamra réduira certainement la distance et représentera un produit similaire.
De plus, le lac de la carrière « Chaaba Hamra » est d’une grande superficie ce qui favorise la pisciculture et rend le projet réussie.
L’exploitation des mines et carrières réalise des chiffres d’affaires très grands partout au Maroc dont la région de Mohammedia. Cette ville recèle d’une richesse minérale très importante (sel gemme, argile, gypse, fer…)
Certaines exploitations, notamment les carrières d’argiles engendrent des impacts négatifs sur la population et surtout sur l’environnement dont la poussière et bruit ainsi que la désharmonie du paysage
Conformément, l’exploitant est tenu de respecter l’étude d’impact par force de loi (loi 12-03) mais certaines personnes ou la majorité ne respectent pas la loi.
La désobéissance est normale car la loi organisant le secteur des mines et carrières souffre de l’ancienneté et l’inapplicabilité.
En effet, le secteur est qualifié d’informel et anarchique. L’exploitation des minerais et matériaux de construction se fait sans étude d’impact et donc sans plan de réaménagement.
De plus, le ministère de l’équipement et de transport ministère tutelle du secteur est en phase d’élaboration d’une nouvelle loi précisant les droit et responsabilités de chaque intervenant dans les domaines des mines et carrières
Après fermeture de la carrière ou la mine, l’entrepreneur est tenu de réaménager le site extractif. Il en existe plusieurs plans de réaménagement dont le reboisement ou le retour à une terre agricole ou la création d’une zone humide….Donc, ce ne sont pas les solutions qui manquent mais c’est la volonté de réaménager qui n’existe pas.
Les carrières sont des sites très sensibles, les carriers doivent améliorer l’exploitation dont dépend la pérennité de leurs activités.
Enfin, nous savons tous qu’une carrière présente des impacts sur l’environnement ainsi que sur la société. Normalement, si tout va bien, il faut que l’exploitation soit bénéfique pour tous les intervenants (investisseurs, employés, riverains…), ceci ne peut être réalisé qu’avec une nouvelle loi sans oublier le rôle important de la sensibilisation pour développer une conscience afin de répartir une culture de réhabilitation.
Bibliographie :
Elgharib B., 2006 : Observations préliminaires sur la réhabilitation des carrières de la commune de Benmansour et utilisation du SIG pour la caractérisation du milieu naturel »,mémoir 3 éme cycle, Rabat : pages
Farki K., Zahour G., Zerhouni Y.,Wafa H ., 2012: “ Contribution to the understanding of the sedimentary and tectono-volcanic evolution of Triassic and Liassic series of Oued N’Fifikh (Coast Meseta, Morocco)”, Ann. Soc. Géol. du Nord.T.19 (2ème série), p. 1-12, Octobre 2012.
Farki K., Zahour G., 2012: Proceeding book “Contribution to the understanding of the sedimentary and tectonovolcanological evolution of Oued Mellah”, International conference of GIS-Users, Taza GIS-Days, P 568-572, May 23-24, 2012.
Geoplusenvironnement, 2010: Rapport de maitrise d’oeuvre de travaux de réaménagement des carrieres de France.
LAFARGE MAROC, 2006: Complément du rapport de l’étude d’impacte de l’exploitation de la carrière BOUSKOURA sur l’environnement.
LAFARGE GRANULAT, 2004: Rapport de la commission locale de suivi et d’information à propos des carrières de Lafarge en France.
Michard A., 1976 : élément de géologie marocaine, notes et mémoire du service géologique N°252, Rabat : 399 pages.
Outtaleb N., 2010 : Caractérisation des sites miniers de Midelt (Mibladen, Aouli, Zaida) et impact environnementale. Mémoire PFE, Casablanca : 46 pages.
Piqué A., 1979 : Evolution structurale d’un segment de la chaine hercynienne. La meseta marocaine Nord-occidentale. Thèse de doctorat es Sciences Naturelles, Strasbourg : 243 pages.
Raoult A., 2007 : Dictionnaire de géologie, 7 éme édition
Yousfi M, Z., 2005: Etude tectonique, volcanique et sédimentologique des formations triasique de l’Oued Mellah. (Meseta côtière, Maroc). Mémoire DESA, Casablanca: 99 pages
Zahour G., Hssaida T., Oumaleh F., Youssfi M,Z., Rouh S., 2007 : Contribution of palynology for the dating pf the sediemtary Lias of the volcanodetritic bassin from the Oued Maleh ( coastal Meseta, Morroco), MARG, 28-31/10/2007, Marrakech.